Le groupe pharmaceutique français va acheter l’américain Synthorx pour 2, 5 milliards de dollars. Il donne un premier aperçu de la nouvelle stratégie du groupe.
L’acquisition de Synthorx, annoncée ce lundi par Sanofi pour 2,5 milliards de dollars, donne un premier aperçu de la stratégie que Paul Hudson , le nouveau patron du groupe pharmaceutique français, doit présenter mardi, à Boston, aux analystes financiers. Arrivé en septembre dernier, il n’aura pas attendu longtemps avant de donner son feu vert à une opération de croissance externe, de surcroît dans un domaine où on attendait un mouvement de Sanofi depuis longtemps : la cancérologie.
La biotech américaine, cotée au Nasdaq, développe des molécules susceptibles de soigner les cancers et les maladies immunitaires, deux domaines dans lesquels Sanofi veut se renforcer ou est déjà présent. La plus avancée d’entre elles, THOR-707, est actuellement en essais clinique de Phase I/II, les deux suivantes n’étant même pas encore au stade préclinique. THOR-707 est une interleukine 2 (IL2), molécule du système immunitaire qui stimule les lymphocytes T et peut être à ce titre utilisée en immunothérapie des cancers.
Eviter les effets secondaires
Ce potentiel des IL 2 est connu depuis longtemps et a déjà été testé dans des cancers du rein et dans le mélanome (cancer de la peau). Mais sous sa forme naturelle, elle est difficile d’emploi en raison d’effets secondaires trop graves et de la dissipation rapide de son effet bénéfique, nécessitant des doses fréquentes et élevées. Jusqu’à une date récente, l’industrie pharmaceutique s’en était donc détournée. Novartis a ainsi cédé les droits américains de son IL2, dénommée Proleukin, à Prometheus Laboratories en 2010, et les droits européens à Clinigen en 2018. Tout le travail de Synthorx et d’autres biotech, comme Neoleukin ou Nektar ou Alkermes, a été de mettre au point des IL2 qui ne présentent pas ces inconvénients.
La molécule de Synthorx est une IL2 « artificielle » qui semble remplir ces critères. Nektar dispose, quant à lui, d’une IL2 en essai clinique de Phase III, en combinaison avec l’Opdivo de BMS. Les résultats de la Phase I/II ont montré une forte augmentation de l’efficacité de la combinaison, comparée à l’Opdivo seul. BMS s’est engagé à achever le développement et réaliser la commercialisation du produit avec Nektar moyennant une mise de 1,5 milliard de dollars qui lui donnera droit à 30 % des revenus. Pour Jean-Jacques Le Fur, analyste chez Bryan Garnier « comparée à cette opération, l’acquisition de Sanofi, qui obtient, lui, 100 % des revenus potentiels de THOR-707 pour 2,5 milliards, est donc plutôt une bonne affaire ».
Quatre molécules
Le groupe français insiste sur la complémentarité de THOR-707 avec son portefeuille actuel et en développement en immuno-oncologie et sur la possibilité de réaliser des combinaisons. Rappelons que ce pipeline se compose principalement de quatre molécules, dont seul le Libtayo a obtenu une première autorisation de mise sur le marché, contre un cancer peu répandu. Sanofi évoque enfin, de façon plus vague, des applications potentielles aux maladies immunitaires.
Source : Les Echos