Le transporteur d’oxygène mis au point par la biotech bretonne a permis une transplantation complexe. Hemarina va déposer une demande de marquage pour une commercialisation espérée l’année prochaine.
L’Institut Amrita des Sciences Médicales de Kochi, en Inde, a été il y a quelques jours le premier hôpital au monde à réaliser une double greffe des membres supérieurs sur un patient de 34 ans. Une performance qui n’aurait pas pu être réalisée sans la contribution d’une biotech bretonne, Hemarina, basée à Morlaix (Finistère). Cette société de 30 personnes a mis au point un transporteur d’oxygène, Hemo2life, à partir du ver marin arénicole, celui qui laisse des petits tas de sable sur les plages du littoral Atlantique à marée basse. Cet invertébré produit une hémoglobine jouant le même rôle que celle de nos globules rouges. C’est cette hémoglobine qui, transformée par la société Hemarina, a permis la conservation des greffons transplantés sur le patient indien.
Une ferme aquacole de 13 hectares
L’entreprise maîtrise l’ensemble de la chaîne de production sur le territoire français, de l’élevage des vers dans sa ferme aquacole de 13 hectares de Noirmoutier au flaconnage du produit, en passant par l’extraction confiée au français Delpharm. « Avec nos 13 hectares nous pouvons produire jusqu’à 30 tonnes de produit par an », explique le président d’Hemarina, Franck Zal.
Si la transplantation réalisée en Inde jette un coup de projecteur sur cette société, son produit Hemo2life sera avant tout utilisé pour des greffes plus banales, comme celles du rein ou du foie. Sans compter son utilisation comme médicament afin de traiter les plaies chroniques (diabétiques en particulier), mais aussi la drépanocytose (maladie des globules rouges), les infarctus ou les blessures cérébrales. A ce jour, l’efficacité et la sécurité du produit, considéré comme un dispositif médical, ont été démontrées pour les greffes grâce à une étude sur 120 transplantations rénales. Ce qui va permettre à Hemarina de déposer en janvier prochain une demande de marquage CE.
Des greffes moins coûteuses
Une étude, médico-économique celle-là, portant sur 460 transplantations rénales devrait s’achever en fin d’année. Elle permettra de justifier un prix de remboursement. « Actuellement, explique Franck Zal, une greffe de rein coûte 70.000 euros. En permettant de conserver les greffons plus longtemps et en meilleur état, Hemo2Life devrait permettre de réaliser une économie ». Car, actuellement, la moitié des greffons pose des problèmes : 20 % n’arrivent pas à temps et 30 % sont rejetés, le plus souvent pour des questions de conservation conduisant les patients à revenir sur les listes d’attente. Or, en France par exemple, le nombre de patients sur ces listes ne cesse de progresser pour atteindre les 20.000, tous organes confondus.
Jusqu’à présent, les sociétés américaine, canadienne ou japonaise qui ont tenté de mettre au point du « sang de substitution » travaillaient à partir d’hémoglobines porcine ou bovine. Elles provoquaient des réactions de contraction des vaisseaux sanguins qui ont conduit à leur abandon. Un effet indésirable qui n’affecte pas l’hémoglobine de ver marin.
Source : Les Echos